En hommage à Max Stahl



Tous ceux qui s’intéressent de près à l'histoire du Timor connaissent le rôle décisif que fut le sien dans les années 1990.

Son grand premier reportage en 1991 a mis en lumière la lutte des Timorais pour l'indépendance et la brutalité de la répression militaire.

Le film monté de 52 min, « In cold blood : the massacre of East-Timor » a gagné le prix du film d’Amnesty International, le prix du festival du film documentaire de Barcelone et le prix Japonais Kagoshima.

Les images du massacre du cimetière de Santa Cruz ont fait le tour du monde et déclenché une vague de mobilisation internationale qui s'est révélé déterminante pour l'attribution, en 1996, du Prix Nobel de la Paix à deux Timorais, l’évêque de Dili, Carlos Ximenes Belo, et le porte-parole de la résistance José Ramos Horta.

 

Il est retourné au Timor notamment en 1999, lors du referendum d'auto-détermination. Quand près de 600 journalistes quittent le pays, Max reste sur place et filme au long de cette période, tant à Dili qui se consume dans les flammes, qu’en montagne où il suit les familles qui s’enfuient. Il a également documenté l’arrivée d’une force internationale mandatée par les Nations Unies.

Les reportages de 1999 ont valu à Max Stahl de gagner le premier prix de journalisme audiovisuel dans le monde (le Prix Rory Peck 2000, soutenu par la BBC, CNN, ITN et les principales chaînes de reportages internationales).

 

Après le retrait indonésien, pendant la période du gouvernement transitoire formé, pour la première fois dans l’histoire, par les Nations Unies (20 septembre 1999 au 20 Mai 2002), il reste dans le pays pour filmer les témoignages des victimes et des auteurs des violences et sur la « justice », et d’autre part, la construction du nouvel État, alors que des milices soutenues par des membres de l’armée indonésienne poursuivent les violences.

Le film monté, intitulé « Justice Denied », a gagné le prix d’or au festival de Films de New York en 2003.

Entretemps il avait créé à Dili le Centre Audiovisuel qui porte son nom , le CAMSTL, qui a continué à filmer, à archiver, à monter des films, à les diffuser. Au total ce sont des centaines de jeunes Timorais et des collaborateurs internationaux qui ont appris à faire une interview, à monter des images, à les classer et préserver.


Max venait régulièrement en Europe, non seulement parce que britannique, mais aussi pour développer des partenariats, diffuser ses images, intervenir dans des programmes de recherche ou des festivals.

Depuis longtemps, d'une manière régulière, il passait à Paris, pendant plusieurs années l'Institut National de l'Audiovisuel (INA) a soutenu la protection du fonds d'images du CAMSTL et Max passait des centaines d'heures à transférer ses images vers des formats plus pérennes, qui résistent à l'usure du temps et à l'évolution des technologies.

Avec l'association France-Timor Leste il était toujours disponible pour présenter ses films, animer des débats (il parlait un français de bon niveau).



C'était le cas lors du Festival de cinéma de Douarnenez en août 2014, qui fut consacré aux cinémas indonésien, timorais et papoua. Il y a a présenté les archives audiovisuelles du CAMSTL, dont 1.000 heures d'images venaient d'être classées par l'Unesco au Registre Mémoires du Monde. Il a animé un atelier consacré au travail d'archivage filmique à partir de sa propre expérience et de ses contactss avec d'autres centre d'images audiovisuelles comme le centre Rithy Panh au Cambodge, qui témoigne du génocide dans ce pays.


Un cancer de la gorge l'a considérablement amoindri depuis plusieurs années, sans jamais l'avoir paralysé.

Son dernier film, "Resistir é vencer = Résister c'est vaincre" a été réalisé en août 2019, projeté lors des célébrations du 20ème anniversaire du referendum d'auto-détermination. Il raconte le martyre du peuple timorais depuis l'invasion indonésienne en décembre 1975 jusqu'à l'arrivée des casques bleus de l'ONU en septembre 1999.

Ce film devait être montré au groupe d'amitié parlementaire France-Timor à l'Assemblée nationale, on a attendu que Max vienne en Europe... l'épidémie du COVD et les restrictions aux déplacements internationaux, l'aggravation de son état de santé, ont fait reporter plusieurs fois cette présentation.


Au Timor, où il a fixé résidence depuis vingt ans, Max Stahl est une figure populaire et un héros national, qui a reçu les plus hautes distinctions de l’État des mains de plusieurs présidents de la République.

Sa disparition est une énorme perte pour le Timor et une grande peine pour tous ses amis.

France-Timor Leste (comme "Agir pour Timor" pendant les années de résistance) était aussi son association. A son épouse Ingrid et à ses enfants, Leo et Malin, nous présentons nos plus sincères condoléances. De loin, nous partageons votre peine.

publié par Association France Timor Leste @ 22:30,

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