Tensions à Dili

RFI on line

Article publié le 14/02/2008 Dernière mise à jour le 14/02/2008 à 11:58 TU

Cela fait maintenant deux jours que les habitants de Dili, qui aiment à passer l'après-midi sur la promenade face à la baie, peuvent voir les va-et-vient du navire de guerre australien envoyé en renfort en plus des soldats déployés par Canberra au lendemain de la double attaque. Une vision qui n'est pas pour rassurer, car bien que la vie continue son cours normal dans la capitale, la situation sécuritaire reste tendue.

La ville de Dili est placée sous haute sécurité.(Photo : Solenn Honorine/RFI)

La ville de Dili est placée sous haute sécurité.
(Photo : Solenn Honorine/RFI)

Par notre correspondante à Dili, Solenn Honorine

Les partisans d'Alfredo Reinado, le rebelle tué lors de l'offensive contre la maison du président, ont enterré leur leader dans le calme, mais sous haute surveillance : des policiers timorais et internationaux patrouillaient tout autour de la maison familiale où reposait le corps au milieu des fidèles. Car un rassemblement de plusieurs centaines de personnes, où les émotions sont à fleur de peau, ne manquait pas d'inquiéter les autorités – d'autant plus qu'il était illégal. Le Timor a prolongé hier l'état d'urgence pour une période de dix jours, ce qui signifie que tout rassemblement et démonstration est interdit, et qu'un couvre-feu reste de vigueur de 20h à 6h. D'ailleurs, si l'enterrement d'Alfredo Reinado s'est déroulé en bon ordre, il a dérogé à la tradition timoraise qui veut que le corps reste exposé pendant une semaine. Pour des questions de sécurité, l'enterrement a eu lieu moins d'un jour après que le corps a été remis à la famille.

La foule lors de l'enterrement d'Alfredo Reinado.(Photo : Solenn Honorine/RFI)

La foule lors de l'enterrement d'Alfredo Reinado.
(Photo : Solenn Honorine/RFI)

Lurdes Meneles est l'une de celles qui restent nerveuses. « J'en veux à Alfredo et ses partisans. C'est à cause d'eux qu'ont eu lieu tous les troubles en 2006 », déclare-t-elle, la lèvre tremblante. Elle et ses huit enfants étaient venus ce matin à la distribution de nourriture organisée par le Programme alimentaire mondial. Quelques sacs de riz, un jerricane d'huile. Depuis les violences de 2006, elle n'a plus de maison et habite dans un camp de réfugiés à Dili ; la ration du PAM est donc la nourriture de base de sa famille, en plus des quelques haricots qu'elle peut acheter de temps en temps. « Je suis inquiète, on ne sait jamais si ça va recommencer », soupire-t-elle.

L'attaque de lundi a toutefois changé une donnée. Jusqu'à présent, le gouvernement tentait de convaincre pacifiquement Alfredo Reinado et ses hommes de se rendre ; mais au vu de l'attaque, la recherche des supporters du rebelle défunt a activement repris.

C'est après qu'un groupe d'hommes liés aux attaques de lundi dernier ont été vus dans un village des environs de Dili que les troupes australiennes, assistées de la police nationale et de l'ONU, ont lancé les recherches dans les collines qui entourent la capitale. Pour l'instant, indique-t-elles, elles ont monté des barrages sur les routes qui serpentent dans la forêt pour surveiller les allers et venues. Elles agissent en vertu de mandats d'arrêt qui avaient déjà été lancés l'année dernière contre 18 hommes liés à Alfredo Reinado, mais leur application avait été suspendue par le gouvernement pour des raisons politiques, alors qu'il essayait de négocier la reddition pacifique des rebelles.

Les rôles bien répartis

On est donc retourné à la situation d'avant mars dernier, lorsque les forces australiennes avaient lancé une offensive contre Alfredo Reinado au cours de laquelle 5 hommes avaient été tués – offensive qui avait déclenché une levée de boucliers contre les Australiens. Normalement, c'est à la police de capturer les hommes recherchés, mais en cas de nécessité – si les personnes résistent – l'armée étrangère peut intervenir en renfort.

L'opération en cours est donc cruciale pour les forces internationales, qui font l'objet de controverses au Timor. Le chef de l'armée timoraise les a accusées d'incompétence pour avoir laissé entrer dans la capitale deux voitures chargées d'hommes en armes. Un député de l'opposition a même affirmé qu'elles avaient ignoré une information qui annonçait l'attaque. Les Australiens nient ces accusations, insistant sur le fait que le président Ramos Horta, qui aimait à se présenter comme un homme proche du peuple, avait insisté sur le fait que sa sécurité personnelle devait être assurée par les forces nationales. Cela fait déjà plusieurs mois que l'irritation monte contre la forte présence australienne, autrefois considérée pourtant d'un bon œil. Le départ de ces troupes était d'ailleurs l'une des exigences du major rebelle que l'on a enterré aujourd'hui.

publié par Association France Timor Leste @ 00:06,

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